Joie d'apprendre

Contexte historique

En 1908 fut créée la première association pour l’Education populaire à Luxembourg. Tout comme en France, l’objectif premier de ce mouvement était de mettre en contact tout le monde avec la culture.

En effet, le terme « populaire » qui, dans un premier sens veut dire « qui émane du peuple ou propre au peuple », signifie dans un sens plus large « propre à tout le monde ». Ainsi la raison d'être de cette association fut la volonté de s’adresser à toutes les couches de la population avec une attention toute particulière pour celles qui se trouvent défavorisées et n'ont pas l'accès facile au savoir, dans le but de leur offrir une instruction culturelle — scientifique, philosophique, littéraire — générale et complémentaire à celle de l’enseignement public de leur époque.

Il ne faut pas oublier qu’au début du 20e siècle, l’éducation scolaire secondaire au Luxembourg est encore essentiellement réservée à l’élite bourgeoise, prioritairement masculine.

Or, fait surprenant, non seulement l’idée de l’éducation populaire provenait des milieux d’intellectuels libéraux de la capitale du Luxembourg – les professeurs et instituteurs jouaient un rôle prépondérant dans certaines sections –, mais un nombre élevé de notables bourgeois, des industriels, des ingénieurs, souvent liés au monde de la sidérurgie, soutenaient le mouvement ou se trouvaient même à la tête d’associations locales qui se propageaient rapidement dans tout le pays, notamment dans le bassin minier. D’ailleurs, afin de maintenir la cohésion entre ces différentes associations locales, un organe central, la « Fédération des associations d’Education populaire » fut créé en 1910.

La présence d’ouvriers comme instigateurs était plutôt l’exception; d’une façon générale, l’engagement « populaire » venait avant tout du bord des artisans et des employés. Mais il faut aussi relever l’engagement des femmes au sein des mouvements associatifs, fait plutôt inhabituel à cette époque.

Activités des A.E.P.

Les activités principales des différentes associations pour l’Education populaire reposaient sur l’encouragement à la lecture par la création de bibliothèques populaires et sur l’organisation de conférences qui s’adressaient à un large public.

La plupart des bibliothèques offraient en majeure partie de la littérature divertissante, la littérature allemande ayant été la mieux représentée. Les bibliothèques des grandes localités, cependant, comportaient aussi un fonds des littératures française, anglaise et luxembourgeoise. S’y ajoutaient des sections de philosophie, de religion, d'histoire, des arts, de littérature technique, de connaissance du monde et des sciences naturelles, ainsi que des collections de revues et de périodiques.

Les conférences publiques devaient avoir des finalités pédagogiques et éthiques: l'éducation populaire par la diffusion de connaissances scientifiques et l’appréciation des arts. Certaines de ces conférences furent publiées dans des brochures dans le but d’élargir encore le cercle de ceux et de celles auxquels s’adressaient ces manifestations culturelles.

Dans cet ordre d’idées, il faut mentionner aussi la fondation d’un hebdomadaire « Les Temps Nouveaux – Die Neue Zeit » et la publication du « Volksbildungskalender » qui offrait un mélange d’informations pratiques, de nouvelles littéraires, de poèmes et d’articles de vulgarisation scientifique.

Parmi les préoccupations du mouvement de l’Education populaire, il faut citer encore des cours du soir pour adultes et l’organisation de colonies de vacances.

Signalons les soirées musicales et littéraires, les soirées d’art dramatique, les fêtes littéraires, les visites guidées d’expositions, les excursions champêtres - toutes des activités culturelles et des loisirs qui remportaient un grand succès auprès du public des A.E.P.

Le rôle des A.E.P. en politique

Enfin, le mouvement de l’Education populaire jouait aussi un rôle politique dans le contexte politico-social de l’époque. C’est ainsi, par exemple, que les responsables des associations réclamaient avec insistance le droit à l’éducation pour les femmes. Ainsi l’idée de la création d’un lycée pour jeunes filles fut propagée par l’A.E.P. d’Esch-sur-Alzette.

L’optimisme de progrès inhérent aux mouvements d’Education populaire fut durement mis à l’épreuve et faisait progressivement place à une désorientation croissante, à une angoisse certaine face à l’avenir.

Dans la lutte contre le fascisme et le nazisme, les mouvements d’Education populaire trouvèrent l’occasion d’une prise de position nette et d’un travail d’éducation politique et culturelle en profondeur. Cela leur valut, sous l’occupation nazie, la dissolution et la confiscation de leurs biens, en particulier des bibliothèques.

Le Centre culturel et d'Education populaire de Bonnevoie

Le mouvement d’Education populaire ne s’est que difficilement remis du coup que lui ont assené les barbares nazis. Le Centre culturel et d’Education populaire de Bonnevoie n'y échappa pas. Cependant, il reçut une impulsion nouvelle et décisive en 1955, lorsque quelques idéalistes relancèrent la section de Bonnevoie, créée le 7 novembre 1910, et dissoute sous l’occupation allemande.

En tant que présidente à partir de 2001, je retracerai brièvement les activités principales de notre association depuis 1955 jusqu’à nos jours.

Un grand nombre de jeunes y adhérèrent dès les premières années. Ils formaient des groupes travaillant dans des domaines variés, tels que le dessin, la peinture, la céramique, l’aéromodélisme, l’électronique, la géologie, l’astronomie. Ils organisaient des sorties d’études et s’exerçaient à exposer au public les résultats de leurs expériences.

Ces initiatives débouchèrent sur la création d’une Maison des Jeunes et de la Culture de Bonnevoie, une association sans but lucratif enregistrée le 22 février 1980. Malheureusement, le local promis par l’Administration communale trouvait une autre destination et la Maison des Jeunes restait lettre morte.

Cette initiative avortée, les activités du Centre culturel continuaient dans des endroits divers et sous des formes diverses.

Les activités sont toujours en relation avec l'idée originale du partage du savoir. Elles comprennent la gestion d'une bibliothèque publique, l'organisation de conférences et de cours du soir tels que des cours d'initiation à la peinture et de perfection des connaissances linguistiques. Nos excursions et voyages d'études rencontrent un succès mérité.

Qu’y a-t-il de plus fascinant que d'apprendre tout au long de la vie ? Divulguer cette pensée d'une manière ou d'une autre, telle est la volonté de tous les bénévoles de notre association sans but lucratif.

Arlette Frascht
Présidente